Les apports de digestats bruts et liquides sont raisonnés au regard des éléments fertilisants qu’ils contiennent. Si l’azote est retenu par la réglementation comme un élément prioritaire pour le dimensionnement de l’épandage, les digestats contiennent cependant d’autres éléments minéraux et souvent dans des proportions équivalentes ; il convient donc de ne pas les ignorer.
Valeur fertilisante - phosphore et potassium
Les digestats ne contiennent pas que de l’azote. On y retrouve aussi tout le phosphore et le potassium des intrants.
Le phosphore
Le phosphore est contenu essentiellement sous forme minérale dans les digestats. De ce fait, sa disponibilité est presque équivalente à celle des engrais phosphatés du commerce. Ce phosphore, une fois apporté au sol, va être utilisé en partie par les cultures ; une autre partie peut soit être fixée au sol et être transformée en formes plus ou moins disponibles pour les plantes (que l’on peut raisonner en interannuel), soit connaître un risque de transfert, principalement par ruissellement-érosion, selon les modalités d’épandage et de gestion de la parcelle.
Les teneurs en phosphore les plus élevées se trouvent dans les phases solides des digestats, notamment celles issues d’une séparation de phases par centrifugeuse ou celles ayant suivi un processus de séchage ou de compostage. Dans les zones excédentaires, la séparation de phases peut être une solution de résorption du P.
Le potassium
Le potassium, compte tenu de sa solubilité, se retrouve surtout dans les phases liquides du digestat et sous forme minérale. Il est donc disponible à 100 % pour les cultures, comme celui des engrais potassiques du commerce. Une fois dans le sol, le potassium va être absorbé par la culture, adsorbé par les argiles ou perdu par lixiviation.
Raisonnement de la fertilisation
En raisonnant les apports de digestat en fonction de l’azote, il ne faudra donc pas oublier de regarder les quantités apportées en autres éléments fertilisants au regard des capacités d’exportation des cultures. On peut avoir deux situations :
- si les quantités apportées par le digestat sont inférieures aux exportations des cultures (et si le stock dans le sol ne permet pas de couvrir les besoins), il va falloir compenser avec des engrais minéraux ;
- si les quantités apportées par le digestat sont supérieures aux exportations, le seuil autorisé par les régimes ICPE risque d’être dépassé (cf. réglementation). Ce seuil est d’environ 65 kg/ha/an de P2O5.
- Calculer les quantités de P et K apportées par le digestat
- Exemple - quantités de P et K apportées par le digestat
Mon digestat a 3 ‰ de P2O5 et 3,5 ‰ de K2O, ai-je besoin de compenser mon apport de 30 m3/ha sur maïs avec un engrais phosphorique et/ou potassique du commerce ?
La quantité de phosphore apportée est de :
Volume de digestat apporté x teneur en P2O5
30 x 3 = 63 kg/ha
La quantité de potasse apportée est de :
Volume de digestat apporté x teneur en K2O
30 x 3.5 = 90 kg/ha
Ces quantités sont à soustraire de la dose de P ou de K à apporter. Le calcul de cette dose est à raisonner à l’échelle de la rotation en considérant les exportations des cultures. Pour le maïs grain les exportations sont de l’ordre de 6 kg P2O5/tonne. Un rendement de 10 tonnes/ha correspond à 60 kg P2O5/ha. Dans l’exemple, un apport de 30 m3/ha de digestat est compatible avec l’équilibre de la fertilisation phosphatée.